1. Naissance des Forces Françaises Libres (FFL)

Le 17 juin 1940, un peu après l’heure de midi, le maréchal Pétain s’adresse aux Français sur les ondes de la radio diffusion nationale et leur déclare que, devant la situation désespérée de l’armée et l’invasion du territoire national, il demande un armistice aux Allemands. Dans l’après-midi le Général De Gaulle, qui ignore encore le discours de Pétain, s’entretient avec Churchill et lui fait part de sa volonté de continuer le combat, qu’il sait perdu sur la terre de France. Dans la soirée, informé de la demande d’armistice, il décide de parler aux Français le lendemain. C’est ce qu’il fait le soir du 18 juin, sur les ondes de la BBC mises à sa disposition par Churchill, et termine son discours par un appel à la lutte. Très peu de Français entendent ce fameux appel du 18 juin. Pour ce faire, il faut non seulement posséder un poste de radio, mais encore, avoir une connaissance de la langue anglaise pour avoir l’habitude de se brancher sur une radio étrangère, même si le discours de De Gaulle était en français.

Pour la plupart, les hommes débarqués ou qui débarqueront sur le sol Anglais n’ont pas entendu l’appel lancé par ce général inconnu. La dizaine de jours pendant laquelle De Gaulle a exercé une fonction de sous-secrétaire d’état à la Guerre, n’a pas été assez longue pour en faire un personnage notoire. C’est encore plus vrai pour les aviateurs car, officier d’infanterie, il est parfaitement inconnu dans l’armée de l’Air, sauf à de rares exceptions au niveau des états-majors.

Le 28 juin, le gouvernement Britannique reconnait le général comme chef des Forces Français Libres (FFL). Le soir même, à la radio de Londres, De Gaulle annonce la création d’une force française terrestre, aérienne et navale composée de volontaires. La France libre ne possède alors qu’un appartement, un téléphone et une machine à écrire à Londres. Le 1er juillet, De Gaulle nomme le vice-amiral Emile Muselier (1882-1965) commandant des forces maritimes restées libres. A défaut d’officier général et supérieur de l’aviation, sauf le commandant de réserve Lionel De Marmier, Muselier est provisoirement nommé au commandement des forces aériennes qui ne seront créées que le 8 juillet. De plus, l’amiral fait adopter la croix de Lorraine comme insigne des FAFL.

Les premiers ralliements :

Le noyau des FFL est constitué par 1300 hommes du corps expéditionnaire français revenu de Narvik en Norvège, auxquels s’ajoutent des volontaires se trouvant en Angleterre, des blessés, des évacués de Dunkerque et des évadés de France. Ils ont répondu aux appels lancés par De Gaulle lors de ses visites de recrutement à la fin juin ou en juillet dans les différents camps en Angleterre où ils sont rassemblés.

D’autres éléments viennent rejoindre les FFL : Des chasseurs alpins du 6e BCA, des jeunes bretons, un bataillon de fusiliers marins, le BFM du lieutenant de vaisseau Détroyat, une section de la 342e compagnie autonome de chars avec 12 chars H39, des artilleurs avec six pièces de 75mm, une section du génie et des hommes du train. Ainsi est crée la 1re Brigade de la Légion Française. Le 15 août, les effectifs de la 1re BLF se montent à 2721 hommes, 103 officiers et 253 sous officiers.

Blessé le 15 juin par une bombe d’avion le capitaine de Hauteclocque réussit à s’échapper malgré sa blessure, traverse une partie de la France à bicyclette, passe en Espagne et au Portugal, et se présente à Londres le 25 juillet. Pour éviter des représailles contre sa famille il adopte le pseudonyme de Leclerc.

En Afrique Noire, des officiers et des petits groupes d’hommes s’échappent pour gagner des colonies britanniques. Au Proche-Orient, le capitaine Foliot passe de Syrie en Palestine avec 126 hommes de la 3e compagnie du 24e régiment d’infanterie coloniale. Le capitaine Jourdier l’imite avec 40 hommes du 1e escadron du 1e régiment de spahis marocains. De Chypre, où stationne un bataillon du 24e RIC, 340 hommes se rallient. Le 30 juillet les deux détachements sont réunis pour former le 1er bataillon d’infanterie de marine : Le BIM. Le 20 juillet, un premier territoire se rallie sous l’impulsion des français résidents : le condominium des Nouvelles Hébrides.

Un évènement tragique :

En juin 1940, au moment de l’Armistice entre la France et l’Allemagne, la Grande-Bretagne est aux abois et ne possède plus que la protection de sa flotte et d’un étroit bras de mer. Churchill décide alors de frapper pour éliminer ce qu’il croit être une menace mortelle : la flotte française tombant intacte entre les mains des Allemands. Il ordonne donc à l’amiral Somerville d’obtenir la reddition de cette flotte basée à Mers el-Kébir en Algérie et au pire de la détruire. Le 3 juillet 1940, l’escadre britannique se présente, et après avoir lancé un ultimatum qui est refusé, commence le feu sur les cuirassés au mouillage dans le port. Le « Bretagne », le « Provence » et le « Dunkerque » sont coulés, provoquant la mort de 1300 marins.  Seul le « Strasbourg » parvient à s’échapper. Churchill vient de creuser un fossé sanglant entre la marine française et britannique et de compromettre gravement le ralliement des marins à la France Libre et plus généralement de nombreux Français.

 

2. Naissance des FAFL en Angleterre

 

Le 26 juin 1940, trois Dewoitine D520 du GC 3/7, pilotés par Littolff, Moulène et Feuillerat, atterrissent en Angleterre. Les trois pilotes sont transférés, le 4 juillet, à Saint-Athan près de Cardiff où sont regroupés les avions et le personnel venu de France et de Belgique. Le camp est doté de tout le confort possible et contraste grandement avec les centres d’instruction français auxquels les aviateurs sont habitués.

Au début de juillet, moins de 200 aviateurs sont rassemblés sur cette base : officiers-pilotes et observateurs, sous-officiers, caporaux, et soldats, élèves-pilotes pour la plupart. Ils sont arrivés depuis une quinzaine de jours les 17, 18 ou 19 juin, de Tours, de Bordeaux, de St Jean d’Angély, de Royan, de St jean de Luz et de Bretagne par avion ou par bateau. Le bilan est maigre : Six capitaines, dont trois d’active, quelques lieutenants, une trentaine de pilotes en tout et pas un officier supérieur. Une douzaine d’appareils français ont été amenés dont trois Bloch 152 par des pilotes polonais.

Dans la soirée du 23 juillet, les rares Français qui peuvent écouter la radio de Londres entendent une voix qui ne leur est pas encore familière, annoncer que le combat des Français a repris dans les airs au-dessus du territoire allemand. En réalité, seuls cinq aviateurs sont en opération : trois sont affectés comme mitrailleurs dans le squadron 149 équipés de bombardiers Wellington et deux pilotes expérimentés d’hydravions sont affectés en tant que pilotes au squadron 210 équipés de Sunderland. Le général De Gaulle, voulant mettre sur pied des unités entièrement françaises plutôt que de diluer les quelques pilotes disponibles dans des unités anglaises, la plupart des pilotes connaissent la déception de ne pouvoir se battre dans une escadrille anglaise.

 

3. A l’entrainement

 

A Saint-Athan, un tri rapide est effectué parmi les navigants, pilotes en particulier selon 3 critères principaux : l’âge, la connaissance de la langue anglaise et le nombre d’heures de vol, qui traduit normalement l’expérience réelle. La plupart des navigants sont arrivés sans leur carnet de vol, tenu généralement par les échelons administratifs et donc resté le plus souvent en métropole. Certains pilotes en ont profité pour majorer plus ou moins leur nombre total d’heures de vol. Mais à la suite d’un nombre trop élevé d’accidents, les autorités britanniques s’apercevront rapidement du subterfuge et enverront presque tout le monde en école. Mesure radicale mais néanmoins judicieuse pour beaucoup, même pour ceux déjà titulaires du brevet militaire français mais manquant d’entrainement. La première sélection élimine de nombreux pilotes confirmés mobilisés comme moniteur mais trop vieux pour faire des chasseurs. Le 2e tri est vite effectué car rares sont ceux qui maitrise la langue anglaise. Pour le dernier critère, c’est plus long et plus difficile. Mais un certain nombre de tests permettent de sélectionner 45 pilotes qui, dès le 17 juillet sont envoyés à la visite médicale avant de rejoindre les écoles du training command de la RAF dès qu’il y aura de la place. Les autres candidats au pilotage, dont l’expérience n’a pas été jugé suffisante, sont regroupés sur la base d’Odiham où sera créé par la suite une école de pilotage franco-belge.

Parmi ces aviateurs, cinq sont déjà en opérations. Les 40 autres pilotes de chasse ou classés comme tel, confirmés pour la plupart ou du moins le prétendant, ont formé 3 groupes et sont à l’entrainement. Une bonne demi-douzaine d’entre eux a déjà combattu pendant la courte campagne de France qui vient de se terminer et deux sont des as de la chasse totalisant au moins cinq victoires (Albert LITTOLF et Jules JOIRE).

Dans la deuxième quinzaine de juillet, une douzaine de sous-officiers pilotes du 1er groupe partent à l’OTU 6 (Operational Training Unit) de Sutton-Bridge pour y suivre une formation sur Hawker « Hurricane ». Dans les faits, leur entrainement ne leur servira pas à grand-chose dans l’immédiat car contrairement à leurs espoirs, ils ne seront pas affectés dans un squadron de chasse mais partiront pour l’Afrique. Le 2e groupe de 15 pilotes sont désignés pour suivre un stage à l’OTU 7 de Hawarden à partir du 27 juillet et partiront également pour l’Afrique. Quant au 3e groupe, il est composé de 12 sous-officiers, désignés un peu plus tard pour la « School of Army Cooperation n°1 » (SAC) d’Old Sarum. Dès le 30 juillet, ils volent sur De Havilland « Tiger Moth ». Le 10 Aout, ils gagnent Odiham où sont rassemblés les aviateurs Français.

Odiham

Depuis le 3 Aout, plusieurs dizaines d’aviateurs ont quitté le camp de Saint Athan pour le camp d’Odiham, camp que le général De Gaulle viendra visiter le 8 Aout. Deux jours plus tard, arrivent la quarantaine de pilotes de retour de stage dans les différentes écoles. Le 15 Aout, les 12 sous-officiers du SAC n°1 sont répartis dans deux OTU, Les N°5 à Aston-Down et la n°6 à Sutton Bridge. Ils s’entrainent sans difficulté et après les vols de prise en main de l’Hurricane, passent aux exercices de combat, à la voltige, en solo ou en formation et aux vols à très haute altitude. Le plus dur reste certainement les communications en anglais dont la plupart ont peu de connaissance.

 

4. La Bataille d’Angleterre

 

A la fin de la première semaine de Septembre 1940, l’Air Chief Marshal Sir hugh Dowding, commandant le Fighter Command, est confronté à la difficulté de remplacer les pilotes perdus depuis le début de la bataille. En théorie, une escadrille de chasse doit rester en ligne entre quatre et six semaines, mais la violence des combats et l’importance des pertes l’oblige à faire relever certaines unités au bout de huit ou dix jours. Il prend donc la décision de classer ses squadrons en trois catégories :

  • La catégorie A regroupe des squadrons stationnés dans la partie sud-est de l’Angleterre sur le territoire du Group 11.
  • La catégorie B concerne un petit groupe de squadrons maintenus à effectifs opérationnels, affectés principalement sur le territoire des Groups 10 et 12. Ces unités sont destinées en priorité à remplacer celles du Group 11 qu’il est nécessaire d’envoyer au repos.
  • La catégorie C concerne tous les autres squadrons stationnés sur le territoire du Group 13 dans le nord du pays ou en Irlande du nord, comprenant quelques pilotes opérationnels après que la majorité des autres ait été transférée dans les unités de catégorie A. Leur mission principale est d’accueillir les pilotes fraichement sortis des OTU et affectés au Advanced Training avant de rejoindre des unités des 2 premières catégories.

C’est donc à la mi-septembre, alors que la bataille bat son plein, que les premiers pilotes sortent des OTU pour rejoindre les unités de catégorie C. Ils apprennent alors, avec surprise, qu’ils sont tous nommés au grade d’adjudant. Pour la plupart des pilotes affectés dans ces squadrons (n 64, 85, 232, 245, 615 sur Spitfire I ou sur Hurricane I) stationnés dans le nord, les sorties sont rares. Ils continuent à s’entrainer au sein de leur unité avant d’être désignés pour participer aux missions de guerre. En Octobre, certains font leurs premiers vols opérationnels dont Mouchotte et Perrin qui est le premier abattu et légèrement blessé. Le 16 octobre, le premier avion touché par un « Free French », le sergent Bouquillard, volant au squadron 249 est revendiqué. C’est un Dornier Do17, partagé avec son coéquipier anglais.

Le 31 octobre, la bataille d’Angleterre est officiellement terminée mais les combats continuent sous forme de bombardements nocturnes et de raids dans le sud de l’Angleterre, effectués par des petits groupes de Messerschmitt Me109E chargés de bombes de 250kg. La RAF instaure alors un système de patrouille pour tenter de les intercepter. Le 1er novembre, le Sergent Choron du 64 touche au cours d’une patrouille un He 115. Mais la 1e victoire homologuée revient à Xavier de Montbron du 92 qui abat un Me109 le même jour. Il en obtient même une 2e, le 9 novembre. La 3e et dernière victoire de 1940 est pour Choron, qui le 21 décembre abat un Do 17 avec deux autres pilotes lors d’une patrouille.

La stratégie du Fighter Command change sous l’impulsion du tout fraichement nommé Air Marshall Sholto Douglas. Partisan de l’offensive, il veut lancer ses squadrons de chasse à l’assaut du continent avec deux objectifs principaux : obliger la Luftwaffe à maintenir des effectifs conséquents à l’Ouest et redonner un esprit de combativité à ses pilotes trop longtemps cantonnés à la défensive. Ces opérations, qui au fil des mois, verront mettre en pratique plusieurs tactiques seront baptisés : Sweep, Rhubarb, Circus, roadstead …

Au 31 décembre 1940, 15 pilotes de chasse Français volent en Grande-Bretagne sous les cocardes de la RAF. Leur nombre est insignifiant et ils continueront pendant plusieurs mois à se battre avant d’être rejoint par leurs camarades d’évasion à mesure de leurs sorties des écoles à partir du 3e trimestre 1941. A titre de comparaison, en juillet 1940, les FAFL étaient moins de 500 alors que les Polonais avaient déjà constitué neuf squadrons, les Tchèques trois squadrons et les Hollandais de l’aéronavale un squadron.

 

5. L’opération de Dakar

 

Au 10 août 1940, les Dewoitine « D520 » sont transférés à Odiham au sud de Londres, où sont regroupés les hommes et le matériel qui vont participer à l’opération de Dakar en vue de rallier l’Afrique Occidentale Française à la France Libre. Les Britanniques aident donc les FAFL à former un premier groupe de combat baptisé Groupe de Combat n°1 « JAM » sous les ordres du commandant Lionel de Marmier et une escadrille baptisée « TOPIC » entièrement équipée en matériel anglais. La plupart des pilotes désignés pour l’Afrique sont fortement déçus. Ils s’attendaient à rejoindre les squadrons de chasse britannique et même, pourquoi pas, à former une escadrille française. 

  • Le Groupe de Combat n°1 « JAM » est constitué de quatre escadrilles :
    • Une escadrille de chasse avec deux Dewoitine « D520 »
    • Une escadrille de bombardement avec six « Blenheim »
    • Deux escadrilles de reconnaissance avec six « Lysander » chacune et deux Caudron « Luciole »
  • L’escadrille « TOPIC » est composée de huit Blenheim.

Les deux groupes sont envoyés par bateau en Afrique. Après l’échec du ralliement de Dakar du 23 au 25 septembre, les avions sont débarqués et remontés à Douala au Cameroun d’où ils seront engagés dans les combats du Gabon en novembre contre les vichystes et dans la protection globale de l’AEF. Le premier D520 s’écrase à Douala, fin octobre, à la suite d’une séance d’acrobatie mal maîtrisée par son pilote (Feuillerat) et le deuxième, par panne moteur, en janvier 1941.

 

6. Combats fratricides en Afrique Equatoriale

 

L’empire français, au moment de la défaite et de l’Armistice est dans l’ensemble favorable à la poursuite de la lutte. L’action du gouvernement de Vichy va, toutefois, dissuader assez vite la plupart des grands officiels des colonies de rejoindre la dissidence. De Londres, De Gaulle engage donc une course de vitesse pour assurer une assise territoriale à la France libre.

  • Au Tchad, le gouverneur Félix Eboué est acquis à la France libre. Le 26 août, avec Pleven et d’Ornano arrivés à Fort-Lamy, le Tchad annonce officiellement son ralliement. Outre sa position stratégique au cœur de l’Afrique, il apporte également le Régiment de Tirailleurs Sénégalais du Tchad (RTST).
  • Au Cameroun, dans la nuit du 26 au 27 août 1940, après un périple aventureux en pirogues à moteur parties depuis la partie du Cameroun sous mandat britannique, Leclerc et Boislambert débarquent à Douala et font basculer, avec l’aide d’une poignée de conjurés, la capitale économique sans un coup de feu. Yaoundé, capitale administrative du Cameroun, suit 2 jours plus tard.
  • Au Congo, le 28 août au matin, le commandant Delange occupe le gouvernement et la ville de Brazzaville avec son bataillon, dépose le gouverneur et proclame le ralliement du Congo. De Larminat, arrivé de Léopoldville, de l’autre côté du fleuve, en prend le contrôle.

Ce ralliement a permis au FAFL de récupérer des unités d’aviation coloniale stationnées au Tchad, au Congo et au Cameroun (un Bloch 120, sept Potez 25, trois Potez 29 et un Potez 540) et de disposer d’une modeste infrastructure aérienne.

  • Le Gabon, enclavé au sein de l’AEF libre, hésite et se désiste. Dans un premier temps le gouverneur Masson annonce son ralliement mais l’arrivée de renforts navals envoyés par le gouvernement de Vichy le conduit à revenir sur sa décision. Le 17 octobre, les Français libres se lancent dans une campagne de ralliement par la force dirigé à contre-cœur par Leclerc qui en a admis la nécessité. Deux colonnes s’enfoncent dans la forêt à partir du Moyen-Congo et du Cameroun. Les chars H39 de Norvège, débarqués à Douala appuient une des colonnes. La progression est très lente sur les pistes taillées en plein cœur de la grande forêt primaire. Leclerc décide d’accélérer le mouvement et organise un débarquement en pleine mangrove à proximité de Libreville là où nul ne l’y attend. Au large les navires britanniques couvrent l’opération. Débarqués dans la nuit du 8 au 9 novembre 1940, les légionnaires de Koenig s’enfoncent avec mille difficultés entre les palétuviers et finalement atteignent la terre ferme et progressent vers l’aérodrome. Un combat bref et dur s’engage. Les légionnaires donnent l’assaut et l’emportent. Deux détachements aériens participent également aux opérations. L’un de Fort-Lamy (un Blenheim, deux Potez 29, un Caudron 510, quatre Lysander) et l’autre de Douala (quatre Lysander, quatre Potez 25, un Potez 29 et un Potez 540). Des combats aériens entre français libres et vichystes se déroulent (Lysander contre GM 167). Ce sera l’unique campagne où des aviateurs des 2 camps s’affronteront et elle laissera une profonde amertume aux Français libres d’avoir été contraints de tirer sur leurs compatriotes. A la fin des combats en novembre ils récupéreront trois GM 167 du GB 1/62 capturés à Libreville.

Le 22 novembre 1940, le groupe de combat n°1 est dissous à Fort-Lamy et ses escadrilles éclatent en unités autonomes : Les deux escadrilles de reconnaissance sont réparties entre le Détachement permanent du Gabon et Moyen-Congo et le Détachement permanent du Tchad. Les six « Blenheim » restent à Fort-Lamy pour former le Groupe Réservé de Bombardement n°1 (GRB1) avec l’escadrille « TOPIC » pour devenir, en 1941, le célèbre « Lorraine ».

Par ailleurs, le cargo italien réquisitionné « Capo Di Olmo », qui transportait une dizaine de Glenn en caisse, parvient à rejoindre un port allié. En septembre le capital en Glenn se monte à une vingtaine d’avions. Par la suite, des cessions de « Maryland » de la RAF (avions formant le reliquat des contrats français) permettront d’armer et de conserver opérationnelles deux autres unités : L’escadrille de bombardement n°2 et une escadrille du groupe « Bretagne »

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7. Quelques évasions en Afrique du Nord

 

En juin 1940, l’appel de De Gaulle a été entendu par certains. Ainsi, six ou sept bombardiers Glen Martin « GM167F » parviennent à s’échapper d’Afrique du Nord et à rejoindre un territoire britannique au cours de la semaine qui a suivi l’Armistice.

  • Le 28 juin, un appareil s’évade d’Oran et se pose à Gibraltar.
  • Dans l’après-midi du 30, huit aviateurs de l’école principale de pilotage de Meknès décollent à bord de trois Glenn. Malheureusement l’un d’eux est abattu par la DCA espagnole en arrivant sur Gibraltar.
  • A l’aube du 1er juillet, cinq aviateurs de la 2ème escadrille du GR 1/61 stationnée à Youks les bains, s’envolent pour l’Egypte avec 2 Glenn.
  • Un autre Glenn, parti d’Oran, arrive à Gibraltar le 2 juillet.

 

8. Naissance des FAFL au Moyen-Orient

 

En juin 1940, la situation des Forces françaises en Syrie et au Liban est extrêmement confuse. La douloureuse surprise de la défaite en métropole passée, chacun s’interroge sur ce qu’il convient de faire. Quelques-uns envisagent de continuer la lutte avec les Britanniques et rejoignent la Palestine et l’Egypte. Un petit détachement de trois chasseurs MS406, envoyé pour défendre Alexandrie dans le flou des débuts des conditions d’application de l’Armistice, ne retournera pas en Syrie. Les échos de l’existence du général De Gaulle n’étant pas encore arrivés jusqu’au Moyen-Orient, la situation restera floue jusqu’à la création d’unités autonomes en janvier 1941.

Pourtant, le 11 juillet 1940, les Anglais autorisent la création de trois escadrilles avec des avions ayant fui en Egypte et qui seront intégrés dans des squadrons de la RAF, renforçant leur potentiel très limité.

  • Le Free French Flight N°1 : Composé de deux Glenn Martin 167, envoyé à Aden en Abyssinie et utilisé comme avion de grande reconnaissance. Cette unité qui est la première unité française à reprendre le combat effectue aussi des mitraillages d’opportunité et des opérations de protection de troupes. Elle se paye même le luxe d’abattre un bombardier trimoteur SM79 italien. Elle disparaîtra d’elle-même car les avions seront abattus par des Fiat CR32 italiens respectivement en septembre et en décembre 40. Le Potez 29 évadé de Djibouti et qui avait rejoint Aden le 5 septembre, sera affecté à une autre unité de la France libre.
  • Le Free French Flight N°2 : Composé de deux MS406, deux Potez 63-11, deux Potez 29. Cette unité effectue des missions de combat dans le désert égyptien au sein du Squadron 80 et 274 puis, en septembre, des missions de protection des raffineries de pétrole de Palestine. Le FFF2 servira de base à la création de la 1e escadrille de chasse des FAFL (ECF n°1) avec des pilotes français venus d’Angleterre. En janvier 1941, les pilotes commencent leur transformation sur Hurricane.
  • Le Free French Flight N°3 : Composé de deux Caudron simoun et un Bloch 181. Cette unité sera affectée aux forces françaises venant du Tchad en janvier 1941.

Les appareils français à bout de souffle seront retirés des opérations en décembre 1940 et seront stockés en avril 1941.

 

9. Les lignes Aériennes Militaires

 

Dès septembre 1940, en raison de l’étendue des territoires à desservir, de l’importance économique et de l’insuffisance des moyens de communications existants, le général De Gaulle se préoccupe d’organiser en Afrique française libre un système de liaisons aériennes. La France Libre développe très tôt une politique économique et commerciale, qui lui permet de se financer et de réduire sa dépendance vis à vis des Britanniques. Dans ce but, toutes les exploitations forestières, minières et vivrières des colonies de l’Empire ralliées à la France Libre, sont réactivées afin d’assurer le financement de l’effort de guerre. Ce sont donc d’abord pour favoriser les échanges entre les différentes parties de l’Empire que le, le 5 décembre 1940, le général De Gaulle ordonne d’étudier la constitution d’Air France Libre. Cette nécessité de s’appuyer sur un réseau de liaisons aériennes apparait de manière d’autant plus pressante, à la fin de 1940, que les Français Libres constatent que leur courrier, confié aux Britanniques, est ouvert et lu par la censure. De Gaulle ne dispose, à cette époque ni de matériel ni de personnel. L’essentiel du matériel français de transport aérien est resté en France ou en AFN et le matériel allié est strictement réservé aux besoins britanniques. Quant au personnel civil, il est très peu nombreux dans les premiers temps à se rallier. Il est certain que, pour les pilotes civils comme pour les pilotes militaires, il n’était pas facile de passer à la dissidence ; les menaces de représailles pesaient réellement sur les familles de ceux qui auraient été tentés par l’aventure. Par ailleurs, des contacts discrets sont établis en Afrique entre certains équipages d’Air France et des Lignes Aériennes Militaires.

 

bibliographie : Voir 1945

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